jeudi 14 mars 2013

Le 8 mars, on en parle encore !



Kiosque arabe
Le 8 mars, on en parle encore !
La semaine dernière, il était trop tôt pour parler du 8 mars, et des femmes, mais il n'est pas trop tard pour en parler trois jours après. D'autant plus que je n'ai pas raté l'occasion sur mon blog (http://ahmedhalli.blogspot.com/), que je viens de réanimer, après avoir épuisé toutes mes réserves de rancœur, et cessé de ruminer des projets de revanche, que je sais irréalisables. La page étant tournée, avec quelques déchirures dues à des pulsions irrésistibles, je suis parti en quête des promesses de renouveau arabe que seules les femmes peuvent tenir. Oui, les pays arabes ont tous célébré le 8 mars, et ils le feraient plutôt deux fois qu'une, puisqu'il ne revient que l'année d'après, et que d'ici là les engagements formulés du bout des lèvres auront été oubliés. Il serait intéressant d'ailleurs de regarder les statistiques des violences faites aux  femmes, des viols et des avanies diverses qu'elles subissent dans la rue, pour les obliger à retourner s'enfermer. C'est souvent ce qui leur arrive, d'ailleurs,  juste en rentrant d'un meeting, d'une rencontre où on leur aura seriné que la femme a arraché des "droits inaliénables". Et elles marchent toujours, même si les trottoirs sont encombrés par des gamins stupides et bornés, qui leur montrent la voie à suivre, celle qui conduit aux cuisines, ou à la chambre à coucher.
De l'espoir, il y en a encore, et il y a des femmes qui ne se privent pas d'y croire, de le dire, et de l'entretenir. Comme ces femmes d'Égypte, qui se sont constituées en comités de défense, et apprennent à se défendre contre le harcèlement sexuel. Elles refusent la ségrégation et l'enfermement qu'on veut leur imposer au nom d'une conception machiste de l'Islam. "Nous ne sommes pas "Aawra" (parties honteuses) mais "Rawaa (merveilles)", proclament-elles en intervertissant les caractères du mot cher aux misogynes. J'ai aussi aimé celui-là : "Non ne dis pas "Aawra", la voix de la femme est "Thaoura" (révolution). Ou bien celui-ci : "Nous avons fait la révolution, et nous pouvons témoigner que les "Frères musulmans l'ont confisquée". La chroniqueuse libanaise Dalal Al-Bizri qui vit, la plupart du temps au Caire a répertorié plus d'une trentaine de mots d'ordre de ce type, dans le quotidien de Beyrouth, "Al-Moustakbal". Ce qui ressort fondamentalement de ces slogans revendicatifs, même s'il n'est pas textuellement exprimé, note notre consœur, "c'est la chute du prestige moral dont jouissaient les "Frères musulmans du temps de Moubarek. Et ce, parce qu'ils se réclamaient du "juste milieu", affichaient leur "modération", et leur "crainte de Dieu". Les voilà qui perdent leur magnétisme politique, ainsi que la rectitude morale dont ils se prévalaient, et qui leur a permis de faire croire aux électeurs qu'ils s'exprimaient au nom de Dieu".
8 mars encore : l'écrivaine koweïtienne, Dalaa Moufti, a apporté sa contribution sur le site "Shaffaf", avec quelques notes acerbes sur les pays arabes, dont voici quelques-unes :
-          Dans nos pays, les hommes de religion, se préoccupent de tout ce qui peut réprimer la femme, et ils abandonnent ses droits, ceux de l'enfant, du pauvre, et du faible à qui veut bien se sentir concerné (si tant est qu'il existe).
-          Dans nos pays, on ne voit de la femme que son corps, son visage, sa voix, son poignet, ses yeux marqués au kohol, et ils oublient qu'elle pense et qu'elle a de l'esprit.
-          Dans nos pays, nous exigeons que les non-musulmans appliquent les lois de notre religion, mais lorsque nous vivons en Occident, nous rejetons leurs lois, et nous cherchons à leur imposer les nôtres.
-          Dans nos pays, nous célébrons la mort, les guerres, et même les défaites (après avoir changé leur nom), et nous faisons la guerre à quiconque célèbre la vie.
-          Dans nos pays, il y a beaucoup de rancune, de colère et de sang, et un tout petit peu d'amour.
Dans la même veine, je vous propose quelques extraits de la confession plaintive d'une jeune fille arabe célibataire, appelons là Ahlem, publiée sur le site "Free-Arabs", sous la plume de Sanaa Elaji. Ahlem est montrée du doigt, parce qu'à trente ans, elle n'est pas encore mariée :
" Mon problème, c'est que je suis célibataire. Le dictionnaire de la langue arabe me considère comme "vieille fille", mais je n'accepte pas ce terme de "vieille fille", c'est une expression misérable. Je suis une célibataire. Et le célibat pour moi est beaucoup plus qu'un statut familial, administratif ou légal. C'est ce choix qui te permet de décréter que ton bonheur ne s'arrête pas nécessairement à un seul être. Je suis celle qu'on considère comme une mineure à vie, mais qui refuse qu'on exerce sur elle une quelconque tutelle; sous prétexte qu'elle est née avec un appareil génital féminin, dans une société qui a peur du corps féminin et qui le recouvre d'un voile répressif". L'autre gros problème de la jeune fille, c'est sa mère : "Ça ne l'intéresse pas que je sois aujourd'hui une ingénieure en informatique respectée dans une des grandes entreprises économiques de mon pays. Il lui importe peu que mon salaire mensuel soit le quintuple de celui que perçoit mon père, petit fonctionnaire, dans une administration locale. Je reste, à ses yeux, une femme qui a échoué tant qu'un homme ne vient pas frapper à notre porte pour demander ma main à mon père".
De la femme, il est encore question avec cette anecdote qui est rapportée dans un livre récent sur Khaddafi, écrit par l'un de ses anciens ministres de l'éducation, un certain "douktour" Akil Hussein Akil. A l'occasion de la célébration de la fête nationale en Russie, Khaddafi, avait délégué son premier ministre à Moscou, avec mission de rencontrer Poutine, et de lui demander  la main de sa fille, pour le rejeton du guide libyen, Saïf-Al-Islam. Il devait faire valoir les bénéfices mutuels qui résulteraient de cette alliance pour les deux pays, en particulier pour la Russie. Ainsi, les portes de la Libye s'ouvriraient-elles en grand devant les entreprises et les investissements russes. Poutine, qui ne voyait pas du tout en Khaddafi, le nouveau Prophète de l'Islam qu'il croyait être, rejeta évidemment cette alliance assez encombrante. Une autre anecdote qui révèle le degré de mythomanie du personnage : après  le déclenchement de la rébellion, il a envoyé un émissaire à ses chefs pour leur proposer de se démettre au profit de son fils Seïf Al-Islam. En échange, il demandait à être proclamé empereur, avec l'appui cet argument spécieux : après tout, le Japon est un État moderne qui a un empereur, pourquoi ce ne serait pas le cas en Libye?
A.H.


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